La signature du propriétaire sur une offre d’acquisition ne l’engage pas toujours à vendre

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Un groupement forestier confie la vente de plusieurs parcelles à une agence immobilière. Une société formule une offre d’acquisition au prix demandé par courrier électronique transmis par l’agence au vendeur. Celui-ci répond à l’agence qu’il est favorable à la proposition mais qu’il souhaite connaître le montage financier de l’acquéreur. L’agence immobilière transmet à l’acquéreur le courrier électronique contenant sa propre offre d’acquisition, sur lequel le vendeur a apposé sa signature et les coordonnées de son notaire, et l’informe par le même message que le vendeur a reçu des offres concurrentes et qu’il attend une proposition d’un autre candidat. Parallèlement, l’acquéreur reçoit un accord de principe de sa banque mais celui-ci ne semble pas avoir été communiqué à l’agence ni au vendeur.

Le vendeur n’ayant pas donné suite, l’acquéreur l’assigne, ainsi que l’agence, en vente forcée.

La cour d’appel conclut à l’absence de vente parfaite. La Cour de cassation confirme. En indiquant qu’il souhaitait connaître le montage financier de l’acquéreur, le vendeur a exprimé le fait que cette information était déterminante de son acceptation. Or le candidat acquéreur ne lui a pas fourni d’éléments ultérieurs à ce sujet. Par ailleurs, le candidat était informé de l’existence d’autres négociations avec des candidats concurrents. Enfin, la signature du vendeur ne suffisait pas à rendre la vente parfaite, en l’absence de mention expresse d’acceptation de l’offre.

à noter : Pour Muriel Suquet-Cozic, cet arrêt offre une nouvelle illustration des difficultés que pose la rencontre des consentements préalablement à la signature de l’avant-contrat. La Haute Juridiction rappelle à plusieurs reprises dans l’arrêt qu’il en va du pouvoir souverain des juges du fond. Ceci rend la tâche du professionnel bien délicate pour déterminer dans chaque cas si la vente s’est nouée ou non, afin de conseiller les parties au mieux sur la poursuite de l’affaire.
Dans la présente espèce, l’apposition par le vendeur, sur l’offre d’acquisition, de sa signature assortie des coordonnées de son notaire a pesé moins lourd dans la balance que son information sur des pourparlers concurrents et la condition liée au financement de l’acquéreur. En effet, en conditionnant dès le début des négociations son accord aux modalités de financement, le vendeur a fait entrer cet élément dans le champ contractuel, de sorte qu’un simple accord sur la chose et sur le prix ne suffisait plus à former la vente. De plus, le fait d’avoir été transparent sur les autres négociations en cours démontrait que le vendeur n’avait pas voulu s’engager.
Toutefois, la Cour de cassation émet une réserve en soulignant que la cour d’appel a « souverainement apprécié la volonté des parties au regard des éléments de preuve qui lui étaient soumis ». La décision aurait pu être différente avec d’autres éléments. Les plus grandes précautions restent donc nécessaires face à ce contentieux, qui demeure fourni.En toute hypothèse, il est toujours conseillé au vendeur, s’il souhaite signer quelque chose à ce stade, de n’accepter une offre que sous la condition expresse de régularisation d’un avant-contrat devant tel notaire avant telle date. Rappelons également que le vendeur n’est jamais tenu de conclure avec le candidat présenté par l’agence, même au prix demandé (M. Suquet-Cozic, Que vaut une offre d’acquisition au prix demandé ? : SNH 21/2022 inf. 11). De façon générale, le vendeur gagnera toujours à être transparent dans la négociation. C’est ce qui l’a sauvé en l’espèce.

 

Cass. 3e civ. 18-1-2024 n° 22-18.996 F-D

© Lefebvre Dalloz 2024

Publié il y a 1 an

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