Des riverains demandent la suspension en référé d’un permis de construire autorisant la réalisation d’une unité de méthanisation. Si l’urgence à suspendre un permis est présumée satisfaite (C. urb. art. L 600-3), ils ne s’en tiennent pas à cela et avancent plusieurs éléments pour démontrer l’existence d’une situation d’urgence. Selon eux, le projet occasionnera des nuisances, notamment visuelles et olfactives, ainsi que des risques pour la sécurité des riverains. En outre, l’urgence est caractérisée du fait de l’irréversibilité des travaux qui seraient entrepris avant que le tribunal administratif ait pu statuer sur la demande d’annulation du permis.
Rejet. Pour le Conseil d’État, le titulaire du permis de construire fait état de circonstances particulières qui justifient d’écarter la présomption d’urgence et ne permettent pas de regarder la condition d’urgence comme remplie :
à noter : Lorsqu’une décision administrative fait l’objet d’une requête en annulation, le juge des référés saisi d’une requête à cette fin peut en ordonner la suspension dans l’attente du jugement (C. just. adm. art. L 521-1). La suspension est subordonnée, d’une part, à une condition d’urgence et, d’autre part, à l’existence d’un doute sérieux relatif à la légalité de la décision.
Eu égard au caractère difficilement réversible de travaux de construction, la condition d’urgence est présumée remplie quand la décision attaquée est un permis de construire. D’abord affirmée par la jurisprudence (CE 27-7-2001 no 230231, Cne de Tulle : BJDU 5/01 p. 381), la présomption d’urgence a été consacrée par le législateur (C. urb. art. L 600-3 dans sa rédaction issue de la loi 2018-1021 du 23-11-2018). Mais elle n’est pas irréfragable (CE 26-5-2021 no 436902 : BPIM 6/21 inf. 350). Le titulaire du permis de construire attaqué peut faire valoir des circonstances particulières justifiant de l’écarter et de rejeter pour défaut d’urgence la demande de suspension.
L’arrêt commenté illustre la nature des circonstances qui peuvent emporter la conviction du juge en ce sens. En l’espèce, après avoir cassé pour erreur de droit une ordonnance par laquelle le juge des référés du tribunal administratif avait suspendu le permis litigieux en raison d’un doute sérieux sur sa légalité, le Conseil d’État statue comme juge des référés sur la demande de suspension. Il constate que la suspension risquerait de déboucher sur l’abandon d’un projet dont la réalisation serait précieuse du point de vue de l’intérêt général. Par ailleurs, les précautions prises par le pétitionnaire devraient éviter les nuisances invoquées par les requérants. Ces deux éléments font pencher la balance du côté d’un rejet pour défaut d’urgence.
© Lefebvre Dalloz 2024
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