Dans le cadre du dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT), les professionnels mentionnés à l’article L 561-2 du code monétaire et financier (parmi eux, des professionnels « non financiers » tels les avocats, les notaires ou les agents immobiliers) sont tenus de déclarer à Tracfin les sommes inscrites dans leurs livres ou les opérations portant sur des sommes dont elles savent, soupçonnent ou ont de bonnes raisons de soupçonner qu’elles proviennent d’une infraction passible d’une peine privative de liberté supérieure à un an ou sont liées au financement du terrorisme (Code monétaire et financier art. L 561-15, I).
Certains de ces professionnels considéraient que le champ de la déclaration de soupçon de l’article L 561-15 du Code monétaire et financier était limité à la seule infraction de blanchiment.
Interrogé par le gouvernement, le Conseil d’État estime au contraire que l’obligation de déclaration porte aussi bien sur les sommes obtenues par la commission d’une infraction passible d’une peine privative de liberté supérieure à un an, quelle que soit la nature de cette infraction, que sur les opérations portant sur ces sommes, ces dernières pouvant le cas échéant constituer des faits de blanchiment.
Il rappelle que cette interprétation est conforme au droit européen qui impose de déclarer ses soupçons s’agissant de fonds provenant d’une activité criminelle ou liés au financement du terrorisme (Dir. UE 2015/849 du 20-5-2015).
à noter : 1. Cette interprétation est également conforme à l’article 69 (du règlement 2024/1624 du 31 mai 2024) relatif à la déclaration de soupçon, qui entrera en vigueur le 10 juillet 2027.
2. La seule restriction à cette obligation concerne aujourd’hui l’infraction de fraude fiscale (C. mon. fin. art. L 561-5, II). Rappelons en effet que les assujettis ne sont tenus de déclarer les fonds soupçonnés de provenir d’une telle fraude qu’en présence de l’un des 16 critères énumérés par l’article D 561-32-1 du Code monétaire et financier. Il peut s’agir par exemple de la réalisation d’une transaction immobilière à un prix manifestement sous-évalué, de l’utilisation d’une société-écran ou encore de la difficulté d’identifier les bénéficiaires effectifs en raison du recours à des structures sociétaires complexes rendant peu transparents les mécanismes de gestion et d’administration.
© Lefebvre Dalloz